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Pourquoi les Assurances et Mutuelles s’y intéresseraient-elles ?
Pour les mutuelles et les assureurs complémentaires santé, un modèle de soins primaires renforcé, même s’il n’est pas un DPC pur, présente plusieurs avantages stratégiques et financiers :
Réduction des Coûts à Long Terme :
- Prévention et détection précoce : Un accès facilité et un suivi plus proactif par un médecin généraliste peuvent prévenir l’aggravation de maladies chroniques (diabète, hypertension) et réduire le recours aux urgences et aux hospitalisations coûteuses. Moins d’hospitalisations, c’est moins de dépenses remboursées par les mutuelles.
- Meilleure coordination des soins : Un médecin traitant qui a le temps de bien connaître son patient et de coordonner son parcours de soins permet d’éviter les examens redondants, les consultations inutiles de spécialistes, et les erreurs médicamenteuses.
Amélioration de la Satisfaction Client et Fidélisation :
- Accès amélioré : Dans un contexte de difficultés d’accès aux médecins (surtout généralistes) et de délais d’attente, offrir à leurs adhérents un accès privilégié à des soins de qualité, avec plus de temps médical et des rendez-vous rapides, serait un avantage concurrentiel majeur. C’est un service à forte valeur ajoutée.
- Santé globale : Mettre l’accent sur la prévention, le bien-être et la personnalisation répond aux attentes croissantes des assurés en matière de prise en charge globale de leur santé, et pas seulement du remboursement des soins curatifs.
Innovation et Positionnement Stratégique :
- Différenciation : Proposer des services innovants liés à la santé primaire permettrait aux assureurs de se différencier sur un marché très concurrentiel.
- Données de santé : En développant des partenariats avec ces structures de soins, les assureurs pourraient, dans un cadre réglementaire strict et avec le consentement des patients, obtenir des données agrégées pour mieux comprendre les besoins de santé de leurs populations et affiner leurs offres.
Adaptation à l’Évolution du Système :
- Face aux problématiques de déserts médicaux et de surcharge des professionnels de santé, les assureurs cherchent des solutions. S’investir dans des modèles de soins primaires structurés est une façon de contribuer à la pérennité du système tout en répondant à leurs objectifs économiques.
Comment cela pourrait-il se concrétiser en France ?
Plutôt qu’un DPC « pur » à l’américaine (paiement direct par le patient sans remboursement sécu), les mutuelles et assureurs pourraient soutenir des modèles hybrides et conventionnés qui intégreraient certains principes du DPC :
- Forfaits « services » ou « bien-être » : Les mutuelles pourraient proposer des forfaits complémentaires à leurs adhérents pour accéder à des services spécifiques dans des cabinets ou centres de santé partenaires : par exemple, des bilans de santé annuels approfondis, des ateliers de prévention, un coaching santé ou un accès privilégié à la téléconsultation. Ces services viendraient en complément des consultations de base remboursées par la Sécurité Sociale.
- Investissement dans des structures : Certains assureurs pourraient investir dans la création ou le développement de centres de santé innovants (comme « Primary » qui travaille déjà sur des modèles hybrides) qui se concentrent sur la médecine de premier recours avec une approche centrée sur le patient et un accès facilité.
- Partenariats avec des réseaux de médecins : Les assureurs pourraient établir des partenariats avec des réseaux de médecins généralistes (notamment au sein des CPTS et MSP) qui s’engagent sur des indicateurs de qualité de service et d’accès aux soins, en échange d’incitations financières ou de facilités administratives.
- Rémunération à la performance ou au forfait : Les assureurs et mutuelles pourraient, en collaboration avec l’Assurance Maladie, expérimenter des modèles de rémunération basés sur des forfaits par patient ou sur l’atteinte d’objectifs de santé, plutôt que sur le seul acte. Cela donnerait aux médecins plus de latitude pour organiser leur temps et privilégier la qualité du suivi.
Et les Entreprises ?
Les entreprises (employeurs) auraient également un intérêt croissant :
- Santé et bien-être des salariés : Une meilleure santé primaire pour leurs employés se traduirait par moins d’arrêts maladie, une meilleure productivité et une plus grande satisfaction au travail.
- Avantage compétitif : Proposer un accès privilégié à des soins de qualité dans le cadre de leurs avantages sociaux (mutuelle d’entreprise) pourrait être un atout majeur pour attirer et retenir les talents.
- Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) : S’engager dans la promotion de la santé de leurs salariés via des modèles de soins innovants s’inscrit dans une démarche RSE.
En résumé, si le modèle DPC américain ne peut être importé tel quel en France, les principes qu’il défend (temps médical de qualité, accès facilité, relation médecin-patient renforcée, prévention) sont très attrayants. Les assureurs, mutuelles et entreprises pourraient jouer un rôle clé en finançant et en promouvant des modèles hybrides qui s’en inspireraient, tout en respectant les principes d’universalité et de solidarité du système de santé français.