Les "Enhanced Games" (Jeux Améliorés) prévus à Las Vegas en mai 2026 sont une initiative très controversée qui a suscité de vives réactions dans le monde du sport et au-delà.

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Le CIO critique les Enhanced Games principalement sur deux fronts majeurs :

  1. La santé et la sécurité des athlètes : C’est l’argument le plus souvent mis en avant. Le CIO et l’AMA soulignent les dangers inhérents à l’utilisation non régulée de substances améliorant la performance, risques cardiovasculaires, hépatiques, rénaux, endocriniens, psychologiques, et même mortels.
  2. L’intégrité et l’équité du sport : Pour le CIO, l’autorisation du dopage pervertit l’essence même de la compétition sportive, qui repose sur le talent naturel, l’entraînement, la discipline et le fair-play. La compétition deviendrait une course à la chimie, et non au mérite athlétique.

Où se situe la « santé » et la « paix » dans ce tableau ?

C’est là que votre question devient cruciale. Si le CIO se positionne comme le garant de la santé des athlètes et de la paix mondiale à travers le sport, ses propres actions et l’histoire du Mouvement Olympique sont souvent entachées de contradictions.

1. La Santé des Athlètes :

  • Pression Extrême et Risques : Même sans dopage, le sport de haut niveau tel qu’il est promu par le CIO impose des pressions physiques et psychologiques extrêmes sur les athlètes. Les blessures chroniques, le surentraînement, les troubles alimentaires, le burn-out sont des réalités pour de nombreux athlètes olympiques. Les carrières sont courtes et les reconversions difficiles.
  • Santé Mentale : La question de la santé mentale des athlètes n’a été que très récemment prise en compte sérieusement par le CIO, alors qu’elle était un problème préexistant et grave.
  • Exemples : Le cas de Simone Biles aux JO de Tokyo 2020 (en 2021) qui s’est retirée de certaines épreuves pour protéger sa santé mentale a mis en lumière cette problématique. Les gymnastes russes dopées dans les années 80 ont également soulevé des questions sur la santé des athlètes.
  • Hypocrisie perçue : Les critiques diront que le CIO est bien placé pour parler des risques du sport de haut niveau, même « propre », et que sa préoccupation pour la santé des athlètes ne s’étend pas toujours à la gestion de la pression inhérente au système qu’il a lui-même créé. Les Enhanced Games poussent certes le curseur beaucoup plus loin, mais la question des limites physiques humaines est déjà centrale dans le sport d’élite.

2. La Paix et les Rapports Internationaux :

  • Politisation Inévitable : Malgré l’idéal de paix et de non-politisation, les Jeux Olympiques ont été et restent un théâtre privilégié de la géopolitique.
    • Boycotts : Les boycotts des JO de Moscou (1980) et de Los Angeles (1984) en pleine Guerre Froide ont montré que les Jeux ne sont pas au-dessus de la politique.
    • Droits Humains : Le choix de villes hôtes dans des pays au bilan controversé en matière de droits humains (ex: Pékin 2008 et 2022) a toujours suscité de vives critiques. Le CIO est alors accusé de privilégier les intérêts financiers et l’image à ses propres valeurs de respect et de dignité humaine.
    • Conflits en cours : La gestion des athlètes russes et biélorusses après l’invasion de l’Ukraine est un exemple récent de la difficulté pour le CIO de concilier ses idéaux de paix et d’universalité avec les réalités brutales des conflits mondiaux. Sa décision de les admettre sous bannière neutre est un compromis qui ne satisfait personne pleinement.
  • Intérêts Commerciaux : Le gigantisme des Jeux, les coûts exorbitants pour les villes hôtes, et l’importance des sponsors ont souvent conduit à des accusations de commercialisation excessive et de dévoiement des valeurs originelles de l’Olympisme. Le sport devient un produit, et non plus seulement une activité spirituelle et physique.

La « Difficulté » de la Critique du CIO :

Oui, la critique du CIO à l’égard des Enhanced Games est difficile à maintenir comme étant purement moralisatrice ou éthique sans être confrontée à ses propres paradoxes.

  • Si le CIO prône la santé, mais expose les athlètes à des risques extrêmes ou tarde à adresser les problèmes de santé mentale, sa position face aux Enhanced Games est affaiblie.
  • Si le CIO prône la paix et l’unité, mais est régulièrement accusé d’ignorer les violations des droits humains ou d’être trop complaisant avec des régimes autoritaires pour des raisons économiques ou politiques, sa position sur la « paix » et la « compréhension » des Enhanced Games semble moins solide.

Cependant, cela ne signifie pas que la critique du CIO est invalide.

La différence essentielle, du point de vue du CIO, réside dans l’intention et le principe fondamental.

  • Le CIO, en théorie, s’efforce de créer un environnement sain et juste, même si les résultats ne sont pas toujours parfaits. Il y a un cadre réglementaire, des efforts (imparfaits) pour la lutte antidopage, et une reconnaissance explicite des droits humains et de la durabilité. L’objectif officiel est de tendre vers ces idéaux.
  • Les Enhanced Games, au contraire, partent d’un principe qui est à l’opposé des valeurs fondamentales du sport traditionnel : ils institutionnalisent et célèbrent explicitement ce que le CIO combat, à savoir le dopage. C’est une transgression directe de ce que le sport olympique considère comme son âme.

En somme, on pourrait dire que la critique du CIO est « difficile » dans le sens où elle met en lumière ses propres incohérences et les défis inhérents à la gestion d’un événement sportif mondial. Mais cette difficulté n’annule pas la différence philosophique fondamentale : le CIO s’inscrit dans une tradition qui promeut des idéaux (même imparfaitement atteints), tandis que les Enhanced Games revendiquent une rupture radicale avec ces idéaux, en embrassant ce qui est considéré par le sport établi comme une « tricherie » et un danger.

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